đ Infrastructure | Cybernetruc #16
Fin du Net, oĂč on commence par parler d'infrastructure et oĂč on invoque William Gibson, François Truffaut et Genpei Akasegawa. Mais surtout, on s'entretient avec Sylvain Grisot, urbaniste circulaire.
Cybernetruc continue dâexplorer nos imaginaires technologiques et numĂ©riques. Ă chaque billet on divague, on imagine et on nâa pas forcĂ©ment les rĂ©ponses. Vous ĂȘtes pratiquement deux cents Ă suivre cette aventure. Bonne lecture !Â
Des [đ„], [đ] ou [đ°] ? Cliquez, ils vous emmĂšneront vers des complĂ©ments dâinformation.
đ San Francisco Bay Bridge
Dans LumiĂšre Virtuelle [đ] â Virtual Light dans sa version originale sortie en 1993 â lâinventeur du Cyberpunk William Gibson [đ] dĂ©crit lâun des futurs possibles de la ville. Que ce soit une ville totalement livrĂ©e aux intĂ©rĂȘts privĂ©s et Ă lâappĂ©tit sans-fin des multinationales, comme le sont Tokyo ou Los Angeles dans le roman, ou la ville livrĂ©e Ă elle-mĂȘme entre ghettos et quartiers auto-gĂ©rĂ©s comme il imagine San Francisco quelques annĂ©es aprĂšs un grand tremblement de terre.
Câest Ă San Francisco que se dĂ©roule la plus grande partie du roman, et plus prĂ©cisĂ©ment autour du San Francisco Bay Bridge [đ]. Faisant Ă©cho au tremblement de terre de 1989 [đ], Gibson imagine un univers dans lequel ce pont est devenu impropre Ă la circulation, remplacĂ© par une sĂ©rie de tunnels construits en un temps record par des robots. Ayant perdu son usage premier, le San Francisco Bay Bridge nâest pas dĂ©truit pour autant : il sert de refuge Ă de multiples populations de la ville, dĂ©munis et prĂ©caires pour la plupart, qui y Ă©tablissent leur logement Ă la façon dâun bidonville suspendu. On retrouve lĂ lâimaginaire des ponts bĂątis du moyen-Ăąge europĂ©en [đŒ]. Gibson lâexplique : le pont est devenu un thomasson.
Mais quâest-ce exactement quâun thomasson ?
Le mot dĂ©rive du nom dâun joueur de baseball amĂ©ricain : Gary Thomasson [đ]. Joueur star des ligues amĂ©ricaines dans les annĂ©es 1970, il quitte les Ătats-Unis pour le Japon en 1981, recrutĂ© Ă prix dâor par les Yomiuri Giants. Mais voilĂ , Thomasson sâadapte mal au style de jeu japonais. En une saison, ses statistiques sâeffondrent et malgrĂ© lâargent investi par le club pour son recrutement, le joueur star reste la plupart du temps sur le banc des remplaçants. Gary Thomasson devient une sorte de dĂ©coration de luxe, et sâil porte encore le maillot de son Ă©quipe, il ne joue plus.
Il a, comme le San Francisco Bay Bridge de William Gibson, perdu son usage.
On doit lâusage du terme thomasson Ă lâĂ©crivain japonais Genpei Akasegawa [đ] qui lâutilisera pour dĂ©signer tous ces petits bouts de bĂąti urbain qui ont perdu leur fonction lors dâun rĂ©amĂ©nagement de la ville : escalier ne menant plus Ă aucune porte, portail placĂ© dans une rue ouverte, bretelle dâaccĂšs ne menant Ă aucune route.
Pont ne permettant plus de traverser la moindre baie.
đ ApartĂ©. Tiens, on se poserait la question : est-ce quâun mot dĂ©signant un objet qui nâexiste plus, qui nâest plus en usage, est lui aussi une sorte de thomasson verbal ?
Je vous laisse réfléchir à ça.
â DĂ©mantĂšlement
Cette mĂ©taphore du thomasson ouvre de nombreuses questions dans la persperctive dâune fin des outils numĂ©riques. Et notamment : que deviendraient alors les vestiges de nos infrastructures numĂ©riques actuelles ? Pour envisager un dĂ©but de rĂ©ponse, on pourrait Ă©tudier la question sous deux angles. Le premier, câest dâobserver la façon dont sont prĂ©servĂ©es, recyclĂ©es ou dĂ©mantelĂ©es nos anciens systĂšmes de communication. Les exemples ne manquent pasâŠ
Le rĂ©seau de la poste pneumatique de Paris [đ] â magnifiquement filmĂ© par François Truffaut dans Baisers VolĂ©s [đ„] soit dit en passant â couvrait Ă son apogĂ©e plus de 427km et permettait dâenvoyer en mode express un pli dâun bout Ă lâautre de la capitale. Mal entretenu et finalement assez dĂ©suet, son exploitation a cessĂ© en 1984, remplacĂ© par dâautres services proposĂ©s par La Poste. Mais son infrastructure physique existe toujours, du moins en grande partie. Si les postes de dĂ©part ou de rĂ©ception des plis ont Ă©tĂ© dĂ©montĂ©s, les tubes eux-mĂȘmes sont toujours prĂ©sents dans les Ă©gouts de Paris. OĂč, il est vrai, ils ne gĂȘnent finalement pas grand monde.
Parce que câest finalement rare quâon dĂ©monte une infrastructure quand celle-ci est invisible, et surtout que son dĂ©mantĂšlement reprĂ©sente un coĂ»t supĂ©rieur Ă son non-entretien. Un autre exemple ? La voie dâessai de lâaĂ©rotrain qui surplombe encore sur quelques kilomĂštres la plaine de la Beauce [đ], et qui, en dehors de lâemprise dâun chantier dâautoroute en 2007, est aujourdâhui quasiment-intacte.
Nos Data Centers et antennes 5G pourraient donc bien, en cas dâabandon des technologies numĂ©riques, ne devenir que de superbes ruines livrĂ©es Ă lâUrbex comme le sont de nombreuses usines ou les centres commerciaux des villes moyennes amĂ©ricaines [đ°].
Pourtant, des infrastructures de communication qui disparaissent, il y en a. Deux exemples rĂ©cents ? Allons-y. Dâabord, les cabines tĂ©lĂ©phoniques [đ„]. En 1998, il y en avait 241 000 opĂ©rationnelles en France, que lâessor du tĂ©lĂ©phone mobile a peu Ă peu rendu obsolĂštes. Elles ne seraient plus que 4 aujourdâhui (en octobre 2023), suite Ă diffĂ©rentes rĂ©formes, lois et directives les excluant des contraintes imposĂ©es Ă France TĂ©lĂ©com/Orange quant Ă lâaccĂšs universel aux tĂ©lĂ©communications [đ]. Mais que devient une cabine tĂ©lĂ©phonique en fin de vie ? Hors quelques spĂ©cimens rĂ©utilisĂ©es comme bibliothĂšque publique ou exposĂ©s dans des musĂ©es des tĂ©lĂ©communications, ces cabines sont en gĂ©nĂ©ral envoyĂ©es Ă la casse et recyclĂ©es pour servir Ă la fabrication dâautres infrastructures.
DeuxiĂšme exemple, le rĂ©seau cuivrĂ© dâOrange (ou Boucle Locale [đ]), et là ⊠câest plus compliquĂ©. ThĂ©oriquement, le rĂ©seau doit ĂȘtre entiĂšrement dĂ©sactivĂ© Ă lâhorizon 2030, date Ă laquelle il devrait ĂȘtre intĂ©gralement remplacĂ© par un rĂ©seau fibre-optique. Rien nâempĂȘchera donc Orange dâen opĂ©rer un dĂ©montage physique complet, ne serait-ce que pour en recycler le cuivre. Une estimation rapide ? Ses plus de 900 000 tonnes de cuivre reprĂ©sentent â les Ă©tudes varient â environs 9 milliards dâeuros de matiĂšre premiĂšre [đ°]âŠ
Mais lâexercice nâest pas aussi simple quâil nây paraĂźt : il reste bien entendu quelques lignes aĂ©riennes que lâon peut simplement dĂ©crocher, mais que faire du rĂ©seau souterrain quand il passe sous une autoroute ou une LGV, quand il traverse des zones protĂ©gĂ©es ? Orange rĂ©cupĂ©rera bien entendu une partie de son trĂ©sor cuivrĂ©, mais de nombreux vestiges en subsisterontâŠ
đ ApartĂ©. Tiens, il faudrait relire et revoir ces quelques classiques de la science-fiction dans lesquels subsistent de grands vestiges des civilisations technologiques. MĂȘme si au final, les monuments symboliques ont bien plus dâimpact dans nos imaginaires. Nous avons tous Ă©tĂ© marquĂ©s par lâapparition de la Statue de la LibertĂ© Ă la fin La PlanĂšte des Singes [đ„]. Oups, spoiler.
â» Recyclage
Alors, si on ne dĂ©monte pas â trop cher ou pas Ă©colo â et si on nâest pas dĂ©cidĂ© Ă laisser derriĂšre-soi un champ de ruines, que peut-on faire ? On peut toujours recycler, câest Ă dire rĂ©utiliser les vestiges de notre civilisation numĂ©rique pour dâautres usages.

Le recyclage urbain, ce nâest pas nouveau. Les usines sont devenues des bureaux depuis de nombreuses annĂ©es [đ], quand elles ne se transforment pas en Ă©cole ou en logement [đ]. Dâailleurs, notre sociĂ©tĂ© numĂ©rique nâa pas attendu pour se rĂ©approprier nos anciens bĂątiments et les transformer en artefacts technologiques. MĂȘme si la dĂ©marche reste anecdotique â contraintes techniques obligent bien souvent â on trouve des Ă©glises [đ], des abris antiatomiques [đ], des silos Ă sucre [đ] ou encore des bunkers [đ] transformĂ©s en data center. Preuve que le recyclage est possible.
đ§ Maintenance
RĂ©utiliser les infrastructures pour dâautres usages, câest lâune des bonnes pratiques de ce que Sylvain Grisot â urbaniste et fondateur de dixit.net [đ»], une agence de conseil et de recherche urbaine â nomme lâurbanisme circulaire : un principe de fabrique de la ville qui permet de limiter lâĂ©talement et lâimpact Ă©cologique de celle-ci [đ].
đ ApartĂ©. Au passage, le dernier livre de Sylvain sur lâadaptation des territoires et de la ville â Redirection Urbaine [đ] â vient de sortir.
Alors, une question : si demain notre architecture numĂ©rique sâeffondre, que deviendra son empreinte : des ruines ou de nouveaux lieux de vie, des carriĂšres ou des symboles ? Et plutĂŽt que de mâinterroger seul, jâen ai discutĂ© avec Sylvain Grisot, justement.
Et lâentretien a pris une tournure⊠inattendue.
đ On passe donc en mode interviewâŠ
Cybernetruc : Quâest-ce que ça tâinspire tout ça ?
Sylvain Grisot : Tout de suite, j'ai envie de me décaler un peu en lisant tes réflexions.
Ce dont tu parles, lâinfrastructure numĂ©rique, ce nâest jamais qu'une infrastructure urbaine. Et aujourdâhui, on associe souvent ces infrastructures Ă une logique de permanence. C'est Ă dire que dans notre imaginaire, elles sont lĂ , elles ne bougent pas jusqu'Ă leur obsolescence. Mais ce que l'on ne rĂ©alise pas, c'est l'impermanence de ces infrastructures.
On les considÚre comme mortes. Or les infrastructures ont une vie. Elles ont à la fois une naissance, elles vieillissent, donc elles se dégradent, et elles meurent. Et tout ça parfois trÚs vite.
Cybernetruc : TrĂšs vite, ça veut dire quoi ? Lâimage du vieux datacenter intact dans la jungle, comme une pyramide inca, ça nâa pas de sens pour nos infrastructures actuelles ?
Sylvain Grisot : Aujourdâhui, Ă partir du moment oĂč on dĂ©cide d'abandonner une infrastructure, vingt ans plus tard il nây a plus rien.
Je caricature peut-ĂȘtre un peu, mais on ne doit pas en ĂȘtre loin pour les bĂątiments les plus rĂ©cents. Il y a lâeau dĂ©jĂ , tout simplement, qui sâinfiltre par le toit. Si on les abandonne, les bĂątiments les plus rĂ©cents vont s'effondrer trĂšs vite. Et câest normal : les choses ont une vie et naturellement, les infrastructures se dĂ©gradent.
Cybernetruc : DâoĂč lâimportance de la maintenance, mĂȘme si elle est souvent invisible pour les utilisateurs ?
Sylvain Grisot : Oui, nos infrastructures demandent un entretien rĂ©gulier. On parle bien sĂ»r des ouvrages d'art, mais Ă©galement des infrastructures numĂ©riques : rĂ©seaux, enrobĂ©s⊠Et mĂȘme au-delĂ de la fibre et du cĂąble, il y a Ă©galement tous les Ă©quipements techniques qui permettent les connexions et interconnexions qui eux aussi vieillissent. Cela demande des rĂ©paration, des transformations, des modifications. De la maintenance.
Cybernetruc : La dĂ©gradation rapide des infrastructures dont tu parlais, elle ne va pas sâarranger du fait du changement des conditions climatiques, câest ça ?
Sylvain Grisot : Effectivement, le changement climatique est lui aussi un facteur dâaccĂ©lĂ©ration de cette dĂ©gradation.Un exemple parlant, câest celui de New-York.
AprĂšs lâouragan Sandy, la ville sâest organisĂ©e et a investi des centaines de milliards de dollars pour faire face aux risques dâouragan, avec des pluies importantes, brĂšves et soudaines. Sandy nâĂ©tait que la deuxiĂšme forte inondation que subissait New-York. La prĂ©cĂ©dente devait dater de 2, 3 ans auparavant. Câest Ă ce moment quâon a pris conscience de la fragilitĂ© de la ville par rapport Ă l'eau. Et quâon a pris conscience Ă©galement que tout cela ne pouvait pas toujours ĂȘtre prĂ©vu.
De telles prĂ©cipitations nâĂ©taient pas listĂ©es dans les abaques â les tables de calcul utilisĂ©es pour estimer lâimpact des prĂ©cipitations. Elles Ă©taient en dehors des rĂ©fĂ©rentiels et se sont abattues sur un territoire en fait complĂštement impermĂ©abilisĂ©. On sait gĂ©rer les afflux dâeau, mĂȘme si câest une ingĂ©nierie complexe. Sauf que lĂ , l'Ă©vĂ©nement de rĂ©fĂ©rence utilisĂ© datait de plus dâun siĂšcle. Lâinfrastructure nâĂ©tait plus adaptĂ©e.
Le changement climatique, ça veut dire cela : plus dâĂ©vĂšnements imprĂ©vus, extrĂȘmes et des rĂ©fĂ©rentiels qui changent Ă©normĂ©ment. Et donc une maintenance, une adaptation forcĂ©ment plus complexe des infrastructures, quelles quâelles soient.
Cybernetruc : Si on aborde un autre point, il y a la question du recyclage des infrastructures numĂ©riquesâŠ
Sylvain Grisot : LĂ aussi, la question est complexe. On parle de âmines urbainesâ, et je trouve le terme trĂšs bien choisi. Aujourdâhui, dans les mines traditionnelles, il commence Ă y avoir des difficultĂ©s d'extraction, c'est Ă dire que les taux de dilution sont plus importants quâil y a 20 ans. En extraire des mĂ©taux comme le cuivre, Ă quantitĂ© Ă©gale, demande de plus en plus dâĂ©nergie.
Câest la mĂȘme chose pour le recyclage. On peut rĂȘver de la âmine urbaineâ. Mais il y a lĂ aussi un tel niveau de dilution des matĂ©riaux, de complexitĂ© d'accĂšs, quâĂ un moment cela n'a aucun sens d'un point de vue Ă©conomique, mais sans doute aussi d'un point de vue environnemental. Les dĂ©gĂąts causĂ©s par lâextraction des matĂ©riaux souterrains, en ville par exemple, seraient par trop considĂ©rables.
Cybernetruc : Et du cÎté des bùtiments ?
Sylvain Grisot : Pour les bĂątiments, on a deux solutions connues, maĂźtrisĂ©es. La premiĂšre, câest de faire du rĂ©versible, c'est Ă dire faire aujourd'hui des bĂątiments qui demain pourront changer d'usage, se transformer en entrepĂŽt, en logement, en autre chose. Aujourd'hui, ce nâest pas vraiment la voie qu'on prend. On prĂ©fĂšre souvent faire de lâhyper spĂ©cifiques.
Sinon, on peut aussi faire du dĂ©montable. Ce qui nâest pas malsain. On fait par exemple des parkings silos qui ont des structures en acier dĂ©montables. Mais aujourd'hui, on prĂ©fĂšre souvent construire du lourd, alors qu'on va souvent constater une obsolescence rapide des bĂątiments.
OK. On oublie donc ces grands symboles de notre sociĂ©tĂ© numĂ©rique, tels que pouvait les rĂȘver une certaine science-fiction, mais Ă©galement â en lâĂ©tat actuel du monde â le recyclage de nos infrastructures actuelles pour la sociĂ©tĂ© technologique du futur.
Reste quoi ?
đ En veille
Une troisiĂšme voie, Ă©voquĂ©e en filigrane tout au long des Ă©changes avec Sylvain Grisot : la maintenance. Une troisiĂšme voie qui rejoint, elle aussi, un certain imaginaire. Celui, non pas dâun effondrement mais plutĂŽt dâune dĂ©croissance choisie et dâun abandon volontaire de certaines technologies. On rejoint par lĂ lâimaginaire Solarpunk [đ] qui fait beaucoup parler de lui en ce dĂ©but dâannĂ©e. Et une certaine science-fiction des annĂ©es 70 Ă©galement, comme celle de Michel Jeury [đ].
On ressortira par exemple ce vieux classique de la SF française que lâon aime particuliĂšrement : Les Ăcumeurs du Silence [đ] dans lequel la technologie abandonnĂ©e temporairement, le temps de laisser une Terre surexploitĂ©e pendant des siĂšcles se reconstituer. Sur cette version de la Terre oĂč les Ă©lites se sont rĂ©fugiĂ©es, endormies, dans les profondeurs, une partie du peuple est restĂ©e Ă la surface avec pour mission de veiller sur les anciennes infrastructures technologiques, jusquâaux jours oĂč le progrĂšs humain pourra reprendre son cours.
Je ne spoile pas.
Laisser la planĂšte se reposer, mais Ă©galement prĂ©server la technologie dâhier pour mieux prĂ©parer lâavenir. Et aprĂšs tout, pourquoi pas.
Je vous laisse gamberger lĂ -dessus ?
Sur la question du « recyclage » des infrastructures je te recommande les travaux dâAlexandre Monnin https://reporterre.net/Capitalisme-les-impasses-de-la-redirection-ecologique